LE SUICIDE DE PONCE PILATE

Françoise Contat

 

Vienne : Métropole du puissant état des Allobroges qui, au temps où elle était une colonie Romaine le point terminus de la voie romaine la Tarentaise qui traversait de part en part la masse des Alpes.

Hérode Ier le grand responsable du massacre des innocents.

Hérode Antipas son fils, chef du district de Galilée et ami de Ponce Pilate, décapité par Jean le Baptiste.

 

En cet hiver 41, c’était à l’heure la plus inquiétante de la nuit que Ponce Pilate, au sortir d’un repas bien arrosé, avait pris le chemin de retour vers sa villa au bord du fleuve.

 

Il lui fallait emprunter la voie Tarentaise et passer par le pont qui enjambait l’Epurateur (le Rhône). Les étoiles s’éteignaient une à une tandis que des nuages mouvants obscurcissaient la lune et que le ciel devenait de plus en plus noir Ponce Pilate sentit la peur le gagner. La forêt qu’il traversait semblait se refermer sur lui.

 

Tout à coup il entendit au loin face à lui un fracas de sabots qui résonnaient sur les galets de la voie romaine. Il lui sembla apercevoir au travers de la pénombre des étincelles dansantes. Déjà un cavalier au cheval noir se ruait sur lui avec un rire sauvage. Au même moment il vit rouler à ses pieds une tête d’homme et, la main sur la bouche, il se jeta en arrière avec un hoquet de dégout.

 

Il leva les yeux sur le cavalier qui passait devant lui. C’était Hérode, Hérode le maudit, décapité, tentant de rattraper sa tête fuyante, tendant ses bras immenses vers elle ; tandis que les rennes, de son cheval à la bouche écumante, flottaient au vent de sa course folle.

 

Au moment où les mains du cavalier aveugle allaient enfin saisir la tête roulante, elle rebondit comme un ballon fou et la chevauchée insensée reprit. Le cheval se cabrait et tournoyait revenant sur ses pas. Pilate se mit à courir en bordure de la voie où les arbres sombres créaient un espace protégé. Il respirait avec force, sa villa était maintenant si proche. Plus que le pont à traverser et il hélerait ses serviteurs. 

 

Eperonnant son cheval le corps sans tête se rapprochait dangereusement. La tête vivante le dépassa au milieu du pont et stoppa soudain. Les bras et les jambes vides de vie Pilate la fixait comme hypnotisé. Soudain pris d’une idée folle il la ramassa et la jeta dans le fleuve.

Ce fut sa dernière vision en ce monde. Le poitrail du cheval du cavalier sans tête le happa et ils plongèrent tous trois à la suite de la tête dans les eaux noires.

 

Hérode Antipas, son ami de toujours, était venu le chercher pour qu’il le rejoigne au royaume des morts.

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