Les trois roses

 

Les trois roses

Françoise Contat

Le seigneur comte de Bosson, avait Trois filles qui se partageaient obéissance grâce et beauté.

Un jour le seigneur comte de Bosson, décida de partir pour la première croisade avec : Raymond de Saint gilles, Guillaume le libérateur et le roi franc Philippe Ier Capet.

Le seigneur comte de Bosson, confia une rose à chacune de ses filles en leur disant :

-Prenez soin de cette rose, comme je le ferais moi-même de ma maison. Je vous la réclamerai à mon retour.

La première Rose-Lyne la mit dans le coffre où elle rangeait ses écheveaux de laine à broder pour la tapisserie et se mit à chanter en tirant sur l’aiguille.

Chant 1

Dans la chanson de nos pères, Monsieur de Malbrough est mort.
Si c'était un pauvre hère, on n'en dirait rien encore.
Mais la dame à sa fenêtre pleurant sur son triste sort,
Dans mille ans, et plus peut-être, se désolera encore.

 

File la laine, File les jours.
Garde mes peines Et mon amour.
Livre d'images, Des rêves lourds.
Ouvre la page À l'éternel retour.

La seconde Rose-monde la mit dans le tiroir où elle ordonnait ses fils de soie à tisser et se mit à chanter en lançant son ouvrage.

Chant 2

Lance la navette ma fille Fais glisser le fil de soie

Tout le jour quand soleil brille Sur le grand métier de bois

Retends bien les fils de trame Accorde les tons jolis

Ton bel ouvrage de dame Prend patience d’un mari.

La troisième Rose thé prit un vase y glissa la fleur puis grimpa les escaliers quatre à quatre et s’accoudant à la fenêtre de sa chambre, elle salua son père et toute l’armée conquérante de grands moulinets de ses bras nus. Elle resta là de longues minutes ; après que le nuage de poussière que soulevaient leurs chevaux se soit dissipé. Alors seulement elle posa le vase sur le rebord de pierre et l’oublia.

Le lendemain  elle se rendit à la Maison forte posée sur le mamelon de roche au-dessus du village car il fallait rentrer le blé, l’orge, le son et le millet. Avec l’intendant du château elle compta les sacs et pris la mesure des niveaux dans les granges.

Quelques jours plus tard Rose-thé se rendit à la Ferme d’élevage. Où s’entassaient : vaches, moutons, cochons, poules, oies et canard.

Elle ordonna qu’on parque la volaille et qu’on en déplace un certain nombre vers la cour basse du château pour la saison froide. Les autres seraient à l’abri des renards et des fouines grâce aux chiens de garde des hommes d’armes qui tenaient campement dans la grande salle.

Elle veilla à l’installation des bêtes et à leur bien-être. Elle surveilla la qualité du fourrage et le volume des litières de paille. Puis elle se rendit dans les caves pour questionner ses gens sur la future conservation des fromages.

Invitée par le père abbé, elle  se rendit au moutier[1], vérifia la solidité des voûtes, l’état de la clôture et de l’enceinte claustrale.

Elle prit soin que l’infirmerie ait du linge et de l’eau pure pour les estropiés de la vie, les aveugles nés, les mendiants et les lépreux.

Elle passa chez l’herboriste pour s’assurer qu’il ait suffisamment de simples de baumes et d’élixir de vie pour aller jusqu’au printemps.

Elle vérifia que les malades aient du pain et que les navettes des ânes porteurs de nourriture, se rendent bien chaque jour faire leur collecte.

Elle rentrait, chaque, soir fourbue. Mangeait avec appétit et montait se coucher non sans regarder l’horizon par la fenêtre de sa chambre en espérant la joie de voir l’armée de retour.

Au château paternel, Rose-Thé dirigea le dragage des douves. Larges de 12 pieds et bien curées l’eau y coulait avec force.  Elles étaient une protection contre les envahisseurs de tout bord et ainsi drainées elles ne gèleraient pas.

Elle recommanda au chef des gardes de  ne jamais laisser sans surveillance les poternes latérales là où souffle le vent de tempête et où l’ennemi pourrait survenir.

La jeune fille était toujours par monts et par vaux se plaisant dans les odeurs de paille de foin, et de pierre fraîchement taillées. Chaque matin elle faisait seller sa jument haquenée pour une tournée des hameaux et des champs. Elle ne se retrouvait au château que pour percevoir la taille, la dîme ou les banalités. Mais les servantes la retrouvaient parfois dans sa chambre blottie dans sa couverture aux mille tons à lire à haute voix de la poésie.

Deux ans passèrent. Au milieu de l’après-midi on entendit le cor puis le tumulte des armures et le hennissement des chevaux. Le père était de retour. Les trompes firent trembler les murs quand il passa la poterne d’entrée. Les trois sœurs se précipitent vers leur père tant aimé et revenu sain et sauf de sa campagne guerrière. Un jeune homme descendit de cheval quelques instants avant lui et se précipita pour l’aider. Les trois jeunes filles ne purent ignorer ses vêtements de prix, sa taille élancée, son regard perçant et, quand il enleva son homme, son visage avenant. Déjà son père les enlaçait en leur baisant le front.

Une fois tous confortablement installés dans la grande salle le père demanda :

- Qu’avez-vous fait de votre rose ?

La première Rose-Lyne se rendit dans sa chambre et fouilla dans ses écheveaux de laine à broder. Elle ramena le bouton de rose aussi frais qu’au premier jour.

Le père continua

-qu’avez-vous fait en mon absence ? 

J’ai brodé vos exploits. Et elle présenta à son père une tapisserie qui couvrait le mur de la grande salle. On y voyait des hommes en armure et son père, à cheval, épée levée menant les troupes à la bataille.

La seconde Rose-monde fila jusqu’à sa chambre prit la fleur dans le tiroir où elle ordonnait ses fils de soie à tisser. Fièrement elle ramena une  rose ouverte, au parfum délicat et fraiche comme la rosée.

Le père l’interrogea elle aussi

-qu’avez-vous fait en mon absence ? 

-J’ai tissé votre voyage et elle présenta à son père une pièce de soie qui faisait le pendant à l’autre sur le mur opposé. On y voyait un navire bravant la tempête et son père, à la poupe, défiant les éléments.

Pendant la présentation de ses sœurs Rose-Thé s’était éclipsée. Elle avait couru jusqu’à sa chambre. Elle s’interrogeait : « Où pouvait bien être cette fichue rose ? » En passant devant la fenêtre ouverte elle vit : le vase vide, les pétales envolés, la tige desséchée. Elle attrapa le tout et descendit rejoindre sa famille et leurs invités.

En la voyant s’approcher le rouge aux joues son père lui demanda :

-Et toi, ma fille, qu’as-tu fait de ce bien que je t’avais confié qu’as-tu fais de la rose ? Frondeuse elle répliqua : « J’en ai fait, mon père, ce que vous-même, vous en auriez fait »  et elle présenta le vase ou vibrait la tige racornie à toute l’assemblée.

Le père éclata de rire. Il se leva, vint la prendre par la main et s’adressa à a ses gens : « En chemin nous sommes passés par sa maison forte et par sa ferme d’élevage, j’ai rencontré le père supérieur et l’herboriste du monastère et une fois au château l’intendant m’a fait son rapport ».

Il se tourna vers ses deux premières fille et leur dit : « La vie s’est écoulée sans vous et vous sans elle. A présent retirez-vous dans vos chambres »

Le seigneur comte de Bosson regarda longuement sa troisième fille et annonça« Quand a vous ma fille vous avez fait le choix de la vie. Le grain est dans les greniers, le vin dans les tonneaux, le fief est prospère j’en veux pour preuve le sourire de mes gens ».

Il fit signe au jeune homme de s’approcher et ajouta en joignant les mains des deux jeunes gens : « A vous Rose-Thé, je donne en mariage Etienne comte d’Autun, ce preux chevalier qui me sauva la vie sous les murailles d’Antioche. Puissiez-vous tous deux faire fructifier notre bien ».

 

[1] Monastère

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